M. Kuder: Italia e Svizzera dal 1945 al 1970

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Titel
Italia e Svizzera dal 1945 al 1970. Commercio, emigrazione, finanza e trasporti


Autor(en)
Kuder, Martin
Reihe
Collection Storia internazionale dell’età contemporanea
Erschienen
Milano 2012: Franco Angeli
Anzahl Seiten
383 S.
Preis
URL
Rezensiert für infoclio.ch und H-Soz-Kult von:
Pietro Nosetti, Muralto

L’ouvrage, centré sur les relations économiques entre la Confédération et la Péninsule, se focalise sur le quart de siècle (entre la fin de la Seconde Guerre mondiale et les troubles économiques et monétaires, accompagnés de bouleversements sociaux et culturels, de la fin des années 60 et du début des années 70) souvent réduit à un «âge d’or» ou aux «Trente glorieuses» (cf. Friboulet, J.-J., «La naissance de l’économie moderne, XVIIIe–XXe siècles», Genève-Zurich-Bâle: Schulthess, 2014, pp. 191–219). Une période et des relations qui méritent d’être approfondies pour échapper à une lecture simpliste des faits passés et contemporains.

La continuité des relations, résultant d’une longue tradition, et la complémentarité des rapports entre les deux pays émergent avec clarté. Un Etat neutre, épargné par le conflit, face à une Péninsule, détruite et partagée qui cherche un redémarrage, poursuivent leurs relations avec, en arrière-plan, les Etats-Unis et, surtout, le contexte européen orienté vers une intégration – encore lointaine de l’union monétaire – qui, comme l’ouvrage le soutient, ne semble pas affecter en profondeur les relations entre Zurich et Milan.

Les relations avec la Péninsule, d’une Suisse petite mais économiquement influente, peuvent conduire, de nos jours encore, à penser que l’Italie est marginale pour l’économie du pays. L’ouvrage nous rappelle, au contraire, l’importance, relative mais pas anodine, que l’Italie a revêtue, entre 1945 et 1970 mais pas seulement, pour l’économie nationale. Il en va de même de la Suisse, pour l’Italie (p. 314). Les quatre arguments traités (commerce, émigration, finance et transports) présentent une unité et une cohérence qu’il faut souligner. Tout d’abord, l’ouvrage a pris en compte l’ensemble des marchés qui composent un système économique: le marché des biens, celui du travail et le marché des capitaux. La Suisse attire le travail des Italiens qui se dirigent vers l’industrie du bâtiment, le textile et d’autres activités, comme le tourisme, à faible valeur ajoutée. Ces secteurs ne sont qu’en partie ceux qui exportent vers l’Italie: l’avantage comparatif de la Confédération lui permet de vendre des biens à plus haute valeur ajoutée (machines, outils et produits chimiques) même si, vers l’Italie, la Suisse exporte, en quantité, des produits alimentaires et cigarettes. Ensuite, la Confédération attire, bien entendu, les capitaux italiens, dont le flux illégal atteint, à cette époque, des ampleurs inédites. De son côté, l’Italie exporte vers la Suisse des produits alimentaires et textiles, mais aussi des combustibles liquides, des machines et des voitures et elle obtient des financements helvétiques. Des financements que des banques, des sociétés et des institutions suisses accordent aux sociétés italiennes, privées et publiques, ou que celles-ci obtiennent à travers l’émission sur le marché suisse de titres financiers. Le chapitre consacré aux transports peut paraître étranger à cette étude alors qu’il permet de la compléter en rappelant l’étendue des relations. De plus, les infrastructures de transports sont déterminantes pour le commerce et le juteux transit de marchandises sur sol helvétique tout en étant source d’investissements pour franchir la frontière et les Alpes.

En bref, au-delà des relations de transports (et l’on pourrait ajouter le secteur de l’électricité) qui nous rappellent la position géographique de la Confédération au carrefour européen, pour la Suisse, l’Italie représente une réserve de maind’oeuvre à bas prix, une source de capitaux et un débouché pour la production nationale et ses investissements. A son tour, pour l’Italie, la Suisse offre du travail, un lieu sûr pour mettre à l’abri les capitaux privés et pour obtenir des financements ainsi qu’un débouché pour sa production et ses investissements aux enjeux parfois stratégiques. Des relations qui ne sont donc pas unidirectionnelles. Hormis les pertes fiscales de l’Italie dues à la sortie des capitaux privés et à la contrebande, et, de l’autre côté, un retard dans la modernisation que certaines entreprises suisses ont probablement enregistré en raison de la disponibilité d’une main-d’oeuvre abondante et peu coûteuse, les deux pays semblent avoir tiré plutôt profit, d’un point de vue économique, de leurs relations.

L’accent mis sur les activités illégales qui traversent les différents chapitres, tout comme la place réservée à des thèmes spécifiques (la contrebande, l’envoi en Italie de fonds par les émigrants, l’émergence de la place financière tessinoise et la réalisation de l’oléoduc entre Gênes et Collombey), outre à enrichir avec des cas pointus l’argument et soutenir la particularité de ces relations, confirme la continuité structurelle de l’étude. L’unité résulte également de la méthodologie: d’un chapitre à l’autre, l’auteur s’appuie sur des données statistiques (parfois disponibles que partiellement mais soigneusement détaillées) et sur des sources d’archives, amples et diversifiées. De même, chaque argument est introduit par le contexte international et institutionnel et une synthèse de la période antécédente, le tout complété d’une riche bibliographie.

Dernier mérite, l’esprit de synthèse qui permet une lecture fluide laissant au lecteur le choix, que nous conseillons, de s’immerger dans les amples notes en bas de page. Un ouvrage de qualité, thèse de doctorat à l’Université de Genève sous la direction des professeurs C. Conrad et M. Cerutti, à juxtaposer, entre autres, au travail de D. Gerardi, «La Suisse et l’Italie, 1923–1950: commerce, finance et réseaux », Ed. Alphil, 2007, dont il constitue une sorte de deuxième volet et le reflet d’une nouvelle génération d’historiens que l’on espère porteuse d’autres recherches.

Zitierweise:
Pietro Nosetti: Rezension zu: Martin Kuder, Italia e Svizzera dal 1945 al 1970. Commercio, emigrazione, finanza e trasporti, Milan: Franco Angeli, 2012. Zuerst erschienen in: Schweizerische Zeitschrift für Geschichte Vol. 66 Nr. 1, 2016, S. 185-186.

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Zuerst veröffentlicht in

Schweizerische Zeitschrift für Geschichte Vol. 66 Nr. 1, 2016, S. 185-186.

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