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Neuere Geschichte

M. Porret: Codice penale per il cantone del Ticino

 

Informationen zu diesem Beitrag

Titel:Codice penale per il cantone del Ticino (1873). Ristampa anastatica.
Herausgeber:Vinciguerra, Sergio
Ort:Padova
Verlag:Casa editrice dott. Antonio Milani CEDAM
Jahr:
ISBN:/

Rezensiert für infoclio.ch und H-Soz-Kult von:
Michel Porret
E-Mail: <Michel.Porretlettres.unige.ch>

Dans toute l’Europe continentale, le passage de l’arbitraire des délits et des peines au principe inverse de leur légalité met fin à l’Ancien régime du droit de punir. Portée par les Lumières, cette révolution juridique est couronnée par le code pénal français (1791, 1810), contemporain de la Déclaration universelle des droits de l’homme et de l’invention de la démocratie des modernes. S’y ajoutent dans la fabrication de la légalité les codes autrichiens (1803) et bavarois (1813). L’Empire exporte dans l’Europe qu’il domine le modèle du code pénal unifié dont se dote, par exemple, la République helvétique (1798-1803). Fixité des crimes et des peines, sécurité du justiciable, harmonisation et individualisation des sanctions selon la nature du délit, fin des supplices et de l’infamie, régime carcéral basé sur la gravité criminelle: inspiré des Lumières et de Beccaria, même lorsque le code maintient la peine capitale en tant que «simple privation de la vie» (France), ce libéralisme pénal assure la modernité punitive de l’État de droit. Le XIXe siècle sera le moment de la généralisation de la codification pénale comme le montre le Codice penale entré en vigueur le 1er mai 1873 dans le canton du Tessin.

Précédé de dix articles qui contextualisent son environnement politique, social, religieux, juridique, institutionnel et normatifs dans son cadre régional, national et étranger au XIXe siècle, donné à lire dans une impression anastatique, le code pénal tessinois de 1873 remplace le premier code criminel du 18 août 1816, dont la paternité revient fortement au juriste milanais Giuseppe Marocco qu’appuient Antonio Albrizzi et ses collaborateurs. Si le code pénal de 1816 représente le code de l’«édification de l’État», celui de 1873 est le code de sa «consolidation». Élégante et érudite (environ 500 appels de note!), cette édition est pourtant dépourvue d’index onomastique et analytique, ce que le lecteur peu au fait de l’histoire juridique ou régionale du Tessin regrettera.

Après le code civil de 1837, le code pénal de 1873 traduit les changements institutionnels, sociaux et politiques qui, souvent dans la violence verbale et physique entre libéraux et conservateurs, et via la révolution libérale-radicale de 1839, modernisent le canton né en 1803. Le jeune avocat de Locarno Giuseppe Nessi, condamné à mort par un tribunal spécial comme meneur de la «révolte» conservatrice de 1841, n’est-il pas fusillé à l’issue de son procès politique? Si le Code tessinois de 1816 illustre les valeurs conservatrices de la Restauration (regime dei Landamani), l’unification cantonale et le renforcement de l’État, celui de 1873 (que complétera le code de procédure pénale de 1895), mis en chantier dans les années 1860, traduit la «nouvelle culture pénale» introduite au Tessin par des juristes formés dans les universités italiennes et les libéraux soucieux d’affirmer la souveraineté cantonale («riflesso antibernese»). Dans le contexte de l’État fédéral qui ne retirera qu’en 1937 la souveraineté cantonale en matière pénale, la plupart des cantons suisses adoptent entre 1843 (Vaud) et 1899 (Appenzell) leur propre code criminel (Valais, 1858; Genève, 1876; Neuchâtel 1855 et 1891), alors qu’Uri et Nidwald restent jusqu’à la fin du XIXe siècle hors de la modernité judiciaire et du mouvement de codification pénale. À l’instar des cantons de Genève, de Vaud, du Valais, de Fribourg, de Neuchâtel et de Berne, le canton du Tessin s’inscrit dans la zone d’influence juridique du code pénal napoléonien de 1810 sans pourtant négliger le code autrichien de 1803. D’autre part, les modèles autrichien de 1803, bavarois de 1813 et allemand de 1871 marquent la législation pénale d’autres cantons.

Nourrissant le débat législatif et politique dès la fin des années 1860, occupant les travaux de la commission gouvernementale chargée de mettre en forme un projet de code pénal (1868), marquée par les réformes concrètes appliquées au Tessin entre 1817 et 1863 (i.e.: abolition de la peine capitale et des peines infamantes pour les crimes politiques en 1851, suppression de l’exposition en 1858, débats abolitionniste dès les années 1860 sous l’impulsion d’Ernesto Bruni, le «Beccaria tessinois », limitation de la peine capitale pour les assassinats en 1863), l’action des juristes est en outre stimulée par une inédite «science juridique tessinoise » qu’illustre par exemple dès 1866 la première revue du canton publiée à Lugano (Repertorio di giurisprudenza patria forense ed amministrative). Le réformisme des codificateurs tessinois vise l’humanisme et le libéralisme du droit de punir. Dans l’héritage beccarien, guidés par le juriste Francesco Carrara actif dans la Commission Pisanelli qui à la même époque fabrique le code italien, ils pensent et élaborent un code pénal de 433 articles, «paradoxalement laïc» dans le milieu catholique cantonal. Si sa systématisation inachevée, son contentieux et son ton parfois moralisant en font bien évidemment un produit juridique de son temps, sa sécularisation et sa modernité résident dans la qualification de la folie comme circonstance d’irresponsabilité pénale ainsi que dans l’abolition de la peine capitale que remplacent, selon la gravité du crime ou du délit jugés, la réclusion perpétuelle, la réclusion à temps et la détention corrective.

La peine capitale est abolie en Suisse pour les crimes politiques dans la Constitution de 1848 et pour tous les crimes de droit commun dans celle de 1874 (dans le droit militaire suisse, la peine capitale reste en vigueur jusqu’en 1992). Or, suite à une série d’homicides atroces commis dans les années 1870, des cantons (Vaud, Fribourg, Saint Gall, Berne, Schaffhouse et Appenzell) demandent l’abolition du droit pénal fédéral. Suite à une votation populaire de 1879, les cantons ont le choix de réintroduire la peine capitale. Le 18 octobre 1940, dans le canton d’Obwald, celle-ci avec la guillotine est appliquée une dernière fois en Suisse pour un crime de droit commun (procès de Vollenweider, meurtrier de deux hommes dont un policier). Abolitionniste dès le code pénal de 1873, peu enclin à céder à la vindicte punitive de la rétribution du sang contre le sang, misant sur le travail pénitentiaire et disciplinaire, le législateur tessinois reste ainsi attaché aux grands principes préventifs, utilitaires et correctifs du droit de punir humaniste selon le libéralisme des Lumières.

Zitierweise Michel Porret: Recensione di: Sergio Vinciguerra (ed.): Codice penale per il cantone del Ticino (1873). Ristampa anastatica, Con scritti di D. Brunelli, C. Carcereri, De Prati, E. Dezza, L. Garlati, R. Garré, A. Manna, A. Rossi, P. Pittaro, E. Tavilla, S. Vinciguerra, Padova, CEDAM, 2011. Prima pubblicazione in: Archivio Storico Ticinese, Vol. 152, pagine 337-339. <http://hsozkult.geschichte.hu-berlin.de/infoclio/id=21024>
 
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